Les médecins battent le pavé contre le projet de loi Santé

Les professionnels de la santé, médecins, internes, infirmiers libéraux, dentistes, espéraient dépasser le cap des 20.000 manifestants pour modifier, voire supprimer le texte de loi qui doit débuter mardi son parcours parlementaire.

« Tous unis », les professionnels de santé affirment « leur refus de ce projet de loi qui remet en cause les valeurs les plus essentielles de nos métiers: la liberté, l’égalité et la santé », ont proclamé des manifestants aux abords du ministère de la Santé (VIIe arrondissement), s’adressant à Marisol Touraine et au président François Hollande.

Appel à la démission 

C’est le message que des représentants syndicaux de médecins et d’internes devaient transmettre directement à la ministre qui les recevaient en fin d’après-midi, alors que quelques dizaines de manifestants, tenus à distance du ministère, scandaient encore « Marisol, montre-toi » ou « Marisol, démission ».

Si une partie des manifestants, partis de Denfert-Rochereau (XIVe) en début d’après-midi, réclament le retrait du texte, voire la démission de la ministre, d’autres plaident pour une réécriture du projet de loi. Tous dénoncent un manque de concertation.

Contre la généralisation du tiers-payant

Autant de griefs, autant de slogans. « Tiers payant généralisé – médecins enchaînés, patients trompés », « les Marisoldes de la santé », « loi Touraine nuit gravement à la santé », pouvait-on notamment lire dans le cortège, où se côtoyaient tee-shirts blancs, vendus dix euros pour l’occasion, blouses blanches et manifestants en tenue de bagnard.

Les attaques contre la ministre fusaient aussi, comme ces pancartes où l’on pouvait lire « Touraine démago dégage vite ou fracas dans les urnes le 22 mars », lors des élections départementales, ou bien encore « Rendez-nous Roselyne », en allusion à l’ancienne ministre Roselyne Bachelot. Au micro, des slogans « Touraine démission » étaient scandés.

Les différentes organisations se comptent aussi, à quelques mois des élections professionnelles prévues en fin d’année.

Les médecins « trop conservateurs » pour une majorité de français

A l’initiative de l’appel à manifester, les jeunes ou futurs médecins ont insisté sur « le malaise » des jeunes praticiens.

Venue de Lyon avec une soixantaine de confrères, Agnès Laville, généraliste de 33 ans, a ainsi choisi de porter une pancarte proclamant « J’étais généraliste », parce qu’elle a « peur pour l’avenir de sa profession ». « Même si je suis un contre-exemple, les jeunes ne s’installent plus », affirme-t-elle.

La Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) a, elle, réclamé le départ du gouvernement de Marisol Touraine, en accusant la ministre de vouloir « faire disparaître » les cliniques.

François Fillon soutient la manifestation

Même l’Ordre des médecins, d’ordinaire discret, a affiché son « soutien » à la manifestation, tout comme l’UMP François Fillon.

Marisol Touraine a pourtant lâché du lest lundi, en acceptant des aménagements à son texte qui comporte aussi un important volet prévention. Elle a notamment reculé sur la délégation de la vaccination aux pharmaciens, qui fera l’objet d' »expérimentations » au lieu d’être inscrite dans la loi.

Une « usine à gaz » administrative

Mais la ministre a maintenu son objectif d’étendre le tiers payant (dispense d’avance de frais lors des consultations) à tous les Français en 2017. Promesse de campagne de François Hollande, la mesure, plébiscitée par les patients, est aussi la plus critiquée par les libéraux. Les médecins redoutent une « usine à gaz » administrative et des difficultés à être remboursés rapidement par l’assurance maladie et les complémentaires santé. Les garanties de la ministre sur les délais de paiement n’ont en rien rassuré les praticiens.

Le président de MG France (généralistes), Claude Leicher, a récusé dimanche toute « opposition de principe » au tiers payant généralisé, en évoquant « une crainte très forte de se faire contraindre à du travail administratif alors que le métier des médecins est de soigner les patients ».

(Avec AFP)


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