Les tractations pour sortir de la crise se poursuivent en Egypte

L’émissaire de l’Union européenne, Bernardino Leon, et les deux envoyés spéciaux des Etats-Unis, le n°2 du département d’Etat Williams Burns et l’ambassadrice au Caire, Anne Patterson, ont rencontré Nabil Fahmy, ministre des Affaires étrangères du gouvernement mis en place par l’armée.

Ils ont aussi rencontré une délégation de partisans de Mohamed Morsi. Ces derniers ont déclaré aux médiateurs internationaux qu’ils respectaient les revendications portées par les manifestations de masse qui ont conduit à sa chute. Mais ils ont aussi demandé à ce que le chef d’état-major des armées et ministre de la Défense, le général Abdel Fattah al Sissi, reste à l’écart de tout accord politique.

Le général a laissé entendre dans un entretien au Washington Post qu’il ne briguerait pas la présidence.

Lors des discussions, Nabil Fahmy a réaffirmé l’attachement du gouvernement intérimaire à une « feuille de route » débouchant sur de nouvelles élections, selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères.

Il a aussi prôné la réconciliation nationale, avec toutes les forces politiques, « tant qu’elles s’abstiennent de toute forme de violence et d’incitation (à la violence) ». Il a souligné que les décisions à prendre relevaient du gouvernement égyptien.

Les émissaires américains et européen ont pour leur part mis l’accent sur la nécessité de mettre fin aux violences, de réconcilier les Egyptiens et de relancer un processus politique incluant toutes les parties en présence. Près de 300 personnes ont été tuées dans les violences qui ont suivi la déposition de Mohamed Morsi.

Depuis son départ, des milliers de partisans des Frères musulmans, dont est issu Mohamed Morsi, se sont regroupés dans deux sites du Caire qu’ils occupent nuit et jour pour demander le rétablissement du président élu.

Des « contacts » avec les Frères musulmans 

Après la réunion, Nabil Fahmy a indiqué à la presse qu’il avait eu des « contacts » avec les Frères musulmans. « Je n’utiliserai pas le terme de négociations. Il y a eu des contacts entre différentes personnalités. Il n’y a pas le souhait d’utiliser la force s’il y a d’autres possibilités susceptibles de réussir », a déclaré le ministre.

Parallèlement, le porte-parole du ministère de l’Intérieur, le général Hany Abdel Latif, est apparu à la télévision. Il a promis aux partisans de Mohamed Morsi la sécurité s’ils évacuaient leurs campements.

« Vos sit-in continuels n’ont pas d’utilité juridique ni politique. Vous aurez une sortie en toute sécurité, vous serez politiquement intégrés », a déclaré Hany Abdel Latif.

L’armée avait d’abord menacé de déloger les pro-Morsi par la force. Mais vendredi, à la suite d’appels lancés par des chefs religieux et par des gouvernements étrangers, le gouvernement intérimaire a promis qu’il n’userait pas de la force pour s’emparer des campements et qu’il se contenterait d’un blocus.

Un « lavage de cerveau »

Toutefois, sur un ton nettement moins conciliant, Hany Abdel Latif a également affirmé que beaucoup de gens voulaient partir mais qu’ils étaient menacés par les pro-Morsi. Toute personne ayant participé à des crimes sera poursuivie, a-t-il dit.

« On vous fait un lavage de cerveau, vous faites l’objet d’une manipulation psychologique. Vous êtes utilisés comme un pion dans les marchandages politiques », a-t-il lancé à l’intention des manifestants.

Tarek El Malt, porte-parole de la délégation des pro-Morsi, a déclaré à Reuters par téléphone après les discussions, que les alliés du président déchu voulaient le rétablissement de la Constitution outre le retour au pouvoir du président élu.

Ce dernier point n’a pas forcément été directement évoqué devant les médiateurs internationaux, d’après ce qu’il a laissé entendre.

Le Front de salut national en première ligne 

Pour Malt, la solution politique doit être négociée au sein du Front de salut national (FSN), une coalition informelle de partis non islamistes qui ont soutenu le renversement de Mohamed Morsi et dont est membre le vice-président par intérim, Mohamed ElBaradeï.

« Je respecte les revendications des masses qui sont sorties le 30 juin, mais je ne consoliderai pas le coup d’Etat militaire », a déclaré Tarek el Malt.

Il a souligné que si les opposants à Mohamed Morsi avaient bien dit qu’il ne devait pas faire partie de la solution politique qui serait trouvée, les pro-Morsi pour leur part voulaient « que Sissi ne fasse pas lui non plus partie de l’équation politique. »

(Avec Reuters)


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