McDo doit-il s’inquiéter de la folie française pour les burgers?

Qui a dit que les Français sont racistes ? S’il y a bien un moment où ils sont très ouverts aux invasions étrangères, c’est à l’heure de passer à table. Comme l’a souvent expliqué Bernard Boutboul, directeur du cabinet Gira Conseil et gourou de la restauration, leur plat préféré est la pizza (Italie), suivie du sandwich jambon-beurre (une invention britannique), lui-même talonné par le hamburger, le casse croûte préféré des cow-boys, nécessairement accompagné de frites réputées françaises partout ailleurs qu’en France. A la différence de la pizza et du sandwich, le burger progresse très vite (+10% en 2014) et ne connait pas la crise puisque l’offre se développe surtout dans le haut de gamme.

Cet appétit français pour le steack haché coincé entre deux buns et une feuille de laitue attire les entrepreneurs venus de tous horizons. Le plus ambitieux est Burger King. Depuis qu’elle a été rachetée par le fonds d’investissement brésilien 3G Capital, cette enseigne américaine célèbre pour son Whopper, a décidé de se relancer à l’international. Revenue en France après 16 ans d’absence, elle possède déjà 21 restaurants dans l’hexagone et vient d’annoncer son intention de recruter 4.000 salariés par an pour atteindre son objectif de 20% du marché en dix ans. Un vrai plan de bataille.

La nouvelle n’a pas dû réjouir le leader du burger en France, McDonald’s (et ses 1.200 restaurants) mais en réalité, cette offensive devrait surtout gêner le numéro deux français Quick. Après une période difficile, l’enseigne franco-belge (groupe Caisse des Dépots) est en phase de reconquête, avec une grande campagne publicitaire à la télévision, plusieurs innovations (dont le premier burger avec les frites incluses et la boisson à volonté) et la rénovation de ses restaurants. Dans son renouveau, l’enseigne vient aussi de créer un nouveau format de restaurant, les Burger Bar by Quick. Un nom qui montre bien que le marché se recentre autour de son plat vedette et qui va permettre à la marque d’offrir une offre simplifiée, réduite à ses produits les plus demandés et les plus rentables, avec des emplacements engageants des coûts beaucoup moins élevés.

Une poignée d’enseignes américaines

Non, la menace la plus inquiétante pour le leader McDonald’s ne vient pas de ses deux challengers, trop occupés à se disputer la deuxième marche du podium. C’est l’arrivée d’une poignée d’enseignes américaines spécialisées dans le burger de qualité, élaboré à la demande, avec les meilleurs ingrédients, qui pourraient bien déplacer les standards de qualité et reléguer le Big Mac au niveau du moyen de gamme. Par le choix d’ingrédients frais, sains, tracés… et un mode de préparation plus élaboré, ces nouveaux venus risquent bien ringardiser le clown Ronald, qui, par exemple, n’a jamais demandé à ses clients quelle était leur cuisson préférée pour la viande  » saignant ?, à point ? », vous demande-t-on systématiquement dans les nouvelles enseignes de burgers.

Le blog spécialisé Fast and food a été le premier à annoncer l’arrivée de la chaîne Five Guys à Paris, après avoir constaté que l’entreprise américaine avait passé une annonce de recrutement d’un directeur. Five Guys (1.000 restaurants aux Etats Unis et au Canada) a le vent en poupe aux Etats-Unis depuis que Barack Obama a été filmé alors qu’il passait une commande dans un restaurant de la chaîne à Washington sous le regard amusé des badauds.

Dans la même veine, Steak’n Shake (530 restaurants américains) est déjà présent en France au centre commercial Plan de Campagne et près du Mucem à Marseille. Un troisième larron, Shake Shak (50 établissements aux Etats-Unis) n’est pas encore passé à l’acte, mais il est déjà à Londres, en Turquie et au Moyen Orient.

Des burgers de gourmets

La bataille sera d’autant plus disputée sur le segment des burgers de gourmets qu’il y a déjà plusieurs enseignes bien de chez nous, qui se sont installées sur le créneau du burger de qualité, à la française. Le plus connu est Big Fernand (15 restaurants dont Londres et Hong Kong), suivi par Blend, voire Memphis Coffee, qui surfe en province sur la vague burger dans un décor très étudié de « diners » à l’américaine comme on voit dans la série télévisée des années 70 « Happy Days ».

Sans compter, l’opportunisme des vieux briscards de la restauration d’enseigne qui misent tous sur le burger pour se refaire une santé : Indiana Café, Buffalo Grill, Hipopotamus, Courtepaille, Chez Clément, Poivre Rouge (Groupe Intermarché), et même les boulangeries Paul (groupe Holder), qui ont trouvé dans le burger, le meilleur moyen de rajeunir des concepts. Une évolution très logique pour Paul et bon nombre de boulangeries françaises, pour qui un bon hamburger est avant tout un pain de qualité fourré au steack haché. Le groupe Holder fait d’ailleurs partie des principaux fournisseurs de buns (les pains à hamburgers) en France. 


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