Portugal : les riches patrimoines immobiliers taxés pour financer les retraites

De quoi avoir quelque frayeurs alors que la dette publique de la France n’est pas des plus brillantes et que le FMI s’est récemment inquiété du niveau record de l’endettement mondial … Le Portugal  devrait dans les mois qui viennent taxer les riches patrimoines immobiliers en vue de financer les retraites.

De là à ce que le gouvernement français tente d’appliquer de telles types de mesures dans l’Hexagone, il n’y a peut-être qu’un pas …. que seules peut-être une élection présidentielle pourrait empêcher nos gouvernant de franchir, dans un premier temps.

Selon le projet de budget remis vendredi soir par le gouvernement socialiste portugais au Parlement, le Portugal prélèvera dès 2017 une taxe sur le patrimoine immobilier des contribuables fortunés, d’une valeur fiscale supérieure à 600 000 euros.

En cours de journée, le Premier ministre socialiste Antonio Costa a annoncé que cet impôt servira à financer le système de retraite du Portugal. « La taxation des grandes fortunes immobilières servira à renforcer la pérennité de notre système de Sécurité sociale et contribuera à la justice fiscale« , a-t-il ainsi déclaré devant les députés.

Selon le projet de budget,si la valeur fiscale de la totalité des actifs immobiliers d’un propriétaire dépasse 600 000 euros, un taux de 0,3% sera prélevé sur la partie supérieure à ce seuil. La recette prévisionnelle de cette taxe, évaluée à 160 millions d’euros par an, « permettra d’augmenter les retraites « , a précisé pour sa part Catarina Martins, dirigeante du Bloc de gauche, un des alliés du gouvernement.

Ce projet de budget vise avant tout à rassurer Bruxelles et les marchés sur la détermination du Portugal à juguler les déficits, tout en ménageant ses alliés de la gauche anti-austérité.  »C’est un budget responsable, marqué par un assainissement des comptes qui est conjugué à des orientations sociales », a résumé le ministre des Finances Mario Centeno, ajoutant qu’il s’attendait à une « évaluation positive » de la part de la Commission européenne. N’oublions pas qu’en juillet dernier, le Portugal a certes gagné l’Euro 2016 …. mais avait été déclaré en dérapage budgétaire par cette dernière. 

Mais comme l’on pouvait s’y attendre, ce projet, à l’étude depuis septembre, a provoqué la colère du secteur immobilier. Luis Lima, président de l’Association des agents immobiliers du Portugal estime que « cet impôt aura des effets dévastateurs sur le secteur et entamera la confiance des investisseurs étrangers ».

Or, ces derniers affluent à l’heure actuelle au Portugal  en vue d’acquérir des maisons et appartements. Au premier rang des acheteurs étrangers figurent les Français (27%), dont de nombreux retraités attirés par des exonérations fiscales, suivis des Britanniques (18%) et des Chinois (13%). Depuis 2013, le Portugal a en effet mis en place une exonération quasi-totale d’impôt sur le revenu pour une durée de dix ans pour les expatriés s’installant dans le pays. L’avantage fiscal mis en place en 2013 repose sur le « statut de résident non habituel », qui suppose de ne pas avoir résidé fiscalement parlant au Portugal au cours des cinq derniers années, sans conditions d’âge ou de nationalité. Cela permet d’attirer à la fois des retraités, avec un fort pouvoir d’achat, et des professionnels de secteurs à forte valeur ajoutée.

En 2015, les trois pays les plus importants en terme de nouveaux résidents étaient la Grande-Bretagne (23%), la Chine (18%) et la France (16%). Sur le premier semestre de l’année 2016, les Français sont passés en tête, représentant 25,5% des nouveaux arrivants, selon les prévisions de l’Apemip.

« C’est une attaque fiscale sans précédent contre le secteur immobilier » alors que « le marché était en pleine croissance, attirant toujours plus d’investissement étranger », s’est insurgé quant à elle l’Association des propriétaires de Lisbonne (ALP). Notons qu’à l’heure actuelle , on compte environ un quart d’acheteurs étrangers dans l’immobilier portugais.

Reste que le seuil de 600 000 euros permettra toutefois d’épargner la plupart des bénéficiaires des visas « gold », permis de séjour accordés à des investisseurs non-européens accédant par ce biais à l’espace Schengen.
Afin d’attirer les investissements, le Portugal octroie depuis fin 2012 ces visas à des candidats disposés à débourser au moins 500 000 euros pour un achat immobilier, investir au moins un million d’euros ou créer dix emplois. En l’espace de 4 ans, 3888 visas de ce type ont été accordés, correspondant à un investissement de 2,37 milliards d’euros. Parmi eux, en grande partie des Chinois, mais également des Brésiliens et Russes.

S’attaquant doublement au secteur immobilier, le gouvernement portugais a également décidé d’augmenter le niveau d’imposition des locations touristiques, qui bénéficiaient jusqu’ici de taux inférieurs à ceux de la location de longue durée. Cette mesure intervient alors que le nombre de touristes hébergés à Lisbonne via Airbnb, plate-forme de location de logements entre particuliers, a doublé en 2015, passant de 213 000 à à 433 000 personnes en une seule année.

Sources : AFP, La Tribune, Apemip

Elisabeth Studer – 15 octobre 2016 – www.leblogfinance.com

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