Pourquoi la France devrait s’inspirer de la Suisse

Il existe un pays dont quasiment personne ne connaît le nom des responsables politiques, ni même leur sexe, et qui semble avancer de manière moins pétaradante que les quatre pays européens avec lesquels il partage ses frontières. La Suisse dispose d’un système de gouvernance démocratique tel qu’on n’attend pas d’un leader providentiel qu’il mette le pays en mouvement et/ou qu’il retarde les horloges de l’histoire. Les citoyens suisses, à condition de réunir désormais 100.000 signatures et d’obtenir l’appui de 8 cantons, peuvent s’opposer à l’entrée en vigueur d’une loi, d’un traité, et peuvent proposer une modification de la Constitution.

En moyenne, 10% des initiatives ont connu une issue favorable. Mais ce taux augmente : depuis 2004, 23% des 34 votations organisées ont ainsi été approuvés. Et lorsqu’un texte est approuvé, le Parlement est tenu de le mettre en œuvre. Chaque votation est bien entendu précédée d’un débat politique.

Initiative populaire ou initiative populiste ? Le peuple suisse a rejeté des initiatives populaires en faveur de la réduction du temps de travail ou de l’introduction d’un impôt sur le capital… Une votation a créé un jour férié. Une autre en cours porte sur un soutien financier pour les vaches à cornes. Une votation, en 2009, a approuvé l’interdiction de la construction de minarets, alors que le Conseil fédéral avait recommandé le rejet de cette initiative populaire. Plus récemment, en février 2014, la votation intitulée “Contre l’immigration de masse” a été acceptée.

Et si, en France, l’introduction du référendum d’initiative populaire permettait de débloquer un certain nombre de sujets que les majorités successives ne parviennent pas à traiter ? Imaginons une votation sur l’harmonisation des régimes de retraite publics et privés… Ou encore un référendum sur la réforme du régime de la fonction publique…

A une époque de crise économique persistante, et de défiance dans les institutions, il faut davantage se méfier des leaders populistes, tapageurs et éruptifs, que du peuple. C’est parce que ce dernier a le sentiment qu’il ne parvient pas à s’exprimer – ou qu’on ne l’écoute pas – qu’il est enclin à se tourner vers des tribuniciens offrant des solutions simplistes. Et ceci limite l’action réformatrice des partis de gouvernement, confrontés aux mouvements populistes extrêmes. Et s’il était temps de faire confiance à un grand peuple… plutôt qu’à un homme – ou une femme – providentiel ? 

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